Vous n’avez pas pu louper l’info : le Haut Conseil de la Santé Publique recommande l’utilisation de masques de catégorie 1 ou de masques chirurgicaux. Vous avez été très nombreux à m’écrire depuis. Je collecte dans cet article des données officielles, sous couvert de mes modestes compétences de Gourde en terme de tissus et de quelques mails échangés avec l’AFNOR et l’IFTH aujourd’hui, pour essayer d’y voir plus clair. Je vous invite à lire l’article jusqu’au bout pour vous faire votre idée (et puis poser des questions ensuite, si vous en avez).
MISE A JOUR DU 22/01/2021 : Olivier Véran demande aux Français “de ne plus utiliser de masque artisanal” Lire l’article de France Info.
Allez, on se retrousse les manches et on se replonge dans le document AFNOR SPEC, la FAQ AFNOR et le dossier de l’IFTH qui regroupe les résultats de tests de tissus. Oh, si vous avez déjà fabriqué des masques à la maison, vous savez que c’est tout le coeur du problème. Les données et les exigences évoluent. En couture de masque comme en tous points dans cette épidémie, nous allons devoir nous adapter pour avoir un masque de catégorie 1 – et peut-être mettre un coup de pied dans ce qui étaient nos certitudes en avril dernier. Courage, ça va bien se passer !
Regardons les qualités que doivent avoir nos matériaux :
Deux performances sont mesurées : la filtration et la respirabilité. Pas si simple de trouver l’équilibre entre les deux.
Les masques sont classés en deux catégories selon le niveau d’efficacité des matériaux utilisés.
– catégorie 1 : composés de matériaux filtrant + de 90% des projections de 3 microns. D’abord destinés aux professionnels en contact avec le public quand ils manquaient, ce sont eux qui sont maintenant plébiscités par le Haut Conseil de la Santé Publique. La faute à ces variants du Covid-19 qui sont ultra contagieux.
– catégorie 2 : composés de matériaux filtrant entre 70 et 90% des projections de 3 microns. Ce sont eux que l’on destinait à un usage collectif au moment où l’on manquait de masques. Souvenez-vous, c’était l’urgence absolue, et ces masques là étaient toujours mieux que rien. Aujourd’hui, ils pourraient être plus efficaces – c’est sans doute là que se cache un levier supplémentaire d’action pour lutter contre le virus. Arf.
Notez, avant de vous lancer dans la lecture de ce qui va suivre, que si l’on veut être sur à 100% des capacités de filtration de son masque, on se dirige vers un masque chirurgical ou un masque industriel de catérgorie 1 dont les matériaux auront été testés. Oui, on s’en serait douté, merci la Gourde. Les capacités de filtration d’un matériau, même bien identifié par sa composition, dépendent de la qualité de ses fils, du process de teinture et de tissage/tricotage. Et nous, pauvre mortels, sommes bien désarmés face à ce constat. Forcément, ça nous énerve, quand on sait ce qu’on donné les couturières quand on était en pénurie de masques au printemps dernier. Aujourd’hui, on a un peu de recul sur la situation, des masques efficaces sont fabriqués de manière industrielle et répondent à des normes strictes. La situation n’est plus à l’urgence et c’est bien légitime de se dire que ce serait bien si tout le monde avait des masques super efficaces. Alors OUI : C’est râlant de se dire que malgré toute la bonne volonté du monde, on ne saura jamais vraiment si le masque qu’on fabrique est un catégorie 1 ou un catégorie 2.
Mais des normes, il y en a sur plein d’objets du quotidien, et c’est plutôt un progrès. Quand on fait monter son gosse sur un toboggan solide ou qu’on est protégé par un airbag efficace dans un accident de voiture, on est bien contents d’avoir des normes et d’avoir des gens qui ont testé ces produits pour nous. Je ne crie pas pour autant à la mort du masque en tissu fait maison, mais certains messages reçus aujourd’hui étaient très amers envers ces fameuses normes. Je crois que la question de l’efficacité des masques en tissu faits maison est bien légitime.
Je ne prétends pas pouvoir choisir le bon masque à votre place. Vous pourrez vous faire votre propre avis à partir des données que vous avez ici, de l’envie de porter des masques jetables, de la possibilité d’acheter des masques en tissu de catérgorie 1, de la possibilté de trouver certains matériaux pour coudre les votres et de choisir des matériaux compatibles avec votre peau/la température extérieure.
Le document AFNOR est surtout destiné aux industriels. Les recommandations en termes de matériaux sont mises à jour régulièrement via des liens accessibles depuis le document. La base de données des matières IFTH qui partage les résultats de la DGA est à présent stable (dernière mise à jour le 26 mai 2020). Dans ce document, la bonne nouvelle, c’est que plusieurs combinaisons sont présentées comme répondant aux exigences de la catégorie 1. La moins bonne, c’est qu’il est difficile d’identifier clairement les matériaux utilisés à la DGA dans une mercerie. Vraiment. On ne pourra donc jamais être sur à 100% que votre masque soit un masque de catégorie 1. Comme je sais que vous n’êtes pas prêts à lâcher les masques en tissu comme ça – et moi non plus pour être honnête- j’ai trié les données en terme d’efficacité ET en terme de faisabilité. Ce qui réduit considérablement les choix.
J’ai retiré de ma sélection les tissus impossibles à identifier (du jersey oui, mais de quoi et en quelle proportion ?) et/ou ceux qui sont impossibles à trouver quand on se fournit dans des merceries classiques (Bonjour, je voudrai du non tissé wetlaid 57gsm DEXTEX 200. Mais siiii, c’est 70% cellulose, 20% liants synthétique et 10% polyester.)
Je me suis aussi permis de retirer ceux qui sont très onéreux (bye bye masque en soie, je t’aimais bien), ou ceux qui promettaient d’être très désagrables à porter (hmmm, du polyester contre mon visage 12h durant ? Non merci!)
Le pendant du document AFNOR pour industriels, ça pourrait être celui-ci, édité par Que Choisir, et cité dans la FAQ que l’AFNOR. La lecture de l’article entier est intéressante, notamment en ce qui concerne les filtres – nous en parlerons plus bas.
Notez que les références de tissus données ici approchent au plus près les valeurs données par l’IFTH ou Que Choisir. Rien ne dit qu’ils réussiraient les tests de la même manière, vous l’avez compris. Si vous trouvez mieux, n’hésitez pas à le poster en commentaire et je mettrai l’article à jour. Merci !
masque à deux couches
On commence tranquillou avec le masque à deux couches, qui s’approche bien du masque que l’on connait déjà. Les matériaux ont un peu changé et l’on se retrouve avec du molleton, du jersey, du sweat, … Aucun changement sur la gamme de montage, vous avez juste à utiliser une aiguille à jersey ou une aiguille à strech.
test n°1204 de l’IFTH page 21
- Couche 1 : molleton 100% coton 300 g/m² en trouver
- Couche 2 : jersey 1137 100% coton 160 g/m² en trouver
test n°166 de l’IFTH page 7
- Couche 1 : Molleton gratté 70% coton 30% polyester 280g/m² en trouver
- Couche 2 : Popeline 65% polyester 35% coton 105g/m² en trouver
QUE CHOISIR y va aussi de son masque à deux couches. Ce sont des sandwichs simples car il sont constitués de deux fois le même tissu. Cela dit, ça interroge un peu car c’est comme si on filtrait le virus au travers de deux fois la même passoire. Avec deux tissus différents, on a plus l’effet passoire + tamis, la filtration semble plus efficace. Je n’ai rien trouvé à ce sujet dans la littérature.
Voilà les 3 combos qui marchent bien à neuf et au bout de 10 lavages :
- 2 couches de jersey coton épais (92% coton, 8%élasthanne, 220g/m2) faut oser les toucans
- 2 couches de jersey viscose type t-shirt (92% viscose, 8% élasthanne, 250g/m2) Celui ci s’approche pas mal
- 2 couches de sweat molleton (95% coton, 5% élasthanne, 300g/m2) Pas trouvé. Si vous avez des suggestions, je vous invite à les faire en commentaire
masque triple couche
Là aussi, on sait où on met les pieds. Il n’y a qu’à assembler les trois couches ensemble comme on le fait avec deux.
test n°1096 de l’IFTH, page 18.
- Couche 1 : Coton Popeline 150g/m2 on en trouve ici , ici et ici
- Couche 2 : PES maille polaire 155g/m2 C’est une polaire très fine type micro polaire en trouver
- Couche 3 : Coton Popeline 150g/m2 (idem couche 1)
La polaire en plein hiver, on dit oui ! Je veux pas casser l’ambiance, mais il y a fort à parier qu’on soit partis pour encore quelques temps avec les masques – et je ne me vois pas trop avec un masque doublé polaire en plein mois d’août ! On avait déjà tenté ça au premier confinement avec les masques type CHU de Grenoble, c’était pas très confortable.
MISE A JOUR DU 21/01/2021 Une belle option est celle de mettre une troisième couche de non tissé en polypropylène :
test n°1065 et n°897 de l’IFTH, page 17.
- Couche 1 : CO 120g/m2 contexture 30/27 57 fils/cm2 en trouver
- Couche 2 : PP non tissé 50g/m2 en trouver
- Couche 3 : CO 120g/m2 contexture 30/27 57 fils/cm2 en trouver
test n° 1224 de l’IFTH, page
- Couche 1 : toile 100% coton 150 g/m² en trouver
- Couche 2 : Non tissé 80 g/m² 100% polypropylène en trouver
- Couche 3 : toile 100% coton 150 g/m en trouver
Celui-ci pose un peu question car il est spécifié qui a été lavé 10 fois pour le test. Les fibres de certaines matières se resserent au fil des lavages. On peut donc avoir un combo de tissu qui est de catégorie 2 au début, qui passe en catégorie 1 au bout de 10 lavages avant de redevenir de catégorie 2 puis inefficace. FIN DE LA MISE A JOUR
masque à filtre
C’est sans doute là que sont mes plus grands espoirs ! Pendant le premier confinement, déjà, l‘idée d’un masque à filtre était sortie – avec des filtres plus ou moins créatifs comme des filtres à aspirateur ou du voile d’hivernage. Je vous encourage vivement à utiliser des matériaux qui garantissent l’innocuité de l’air inhalé. Oh et on oublie le masque en tissu enduit hein ?
D’après le document de Que Choisir, on pourrait démultiplier les qualités de nos masques tissus deux couches avec un mouchoir ou de l’essuie tout. C’est un modèle à insert composé de deux couches de tissu avec une ouverture en bas pour y glisser un filtre. C’est une option intéressante qui pourrait nous donner plus de liberté quand au choix des tissus. Reste à bien changer le filtre régulièrement, car la cellulose a tendance à s’humidifier très rapidement.
Mondial Tissus vend du filtre au mètre qui a l’avantage d’être cousu avec les deux couches de tissu. Inséré entre deux couches de tissu, il en fait un masque de catégorie 2. Après 10 lavages, il passe en catégorie 1. C’est plutôt une bonne nouvelle, mais on en sait pas combien de temps il y reste. On peut aussi se trouner vers des matériaux intissés. Je vous renvoie au document de l’IFTH pour savoir lequel choisir. Moi, j’ai pas le courage !
Toujours est il qu’on a bien du mal à identifier les tissus qui pourraient servir dans ce combo là qui mèneraient au masque de catégorie 1. Peut-être des double couche agrémentés d’un filtre ? Retour à la case départ.
Ceux qu’on aurait bien aimé mais…
test n°1219 de l’IFTH page 22. : Contre toute attente, ces tissus sont difficiles à identifier en mercerie. Si vous l’avez trouvé, n’hésitez pas à le mettre en commentaire.
- Couche 1 : satin 100 % coton – 130 g/m² – 90 fils/cm
- Couche 2 : percale 100 % coton – 78 g – 80 fils/cm
- Couche 3 : satin 100 % coton – 130 g/m² – 90 fils/cm
test n°165 de l’IFTH page 7
- Couche 1 : Molleton gratté 70% coton 30% polyester 280g/m² en trouver
- Couche 2 : Jersey élasthanne bio 96% coton 4% polyester 185g/m² on ne sait pas quelle quantité d’élasthanne avoir. Et sans en tenir compte, je n’ai pas trouvé. Si vous l’avez trouvé, n’hésitez pas à le mettre en commentaire.
Test n°1222 de l’IFTH page 22 :
- Couche 1 : Sergé coton 280 g/m² en trouver
- Couche 2 : Milano coton 280 g/m² Introuvable en 100% coton en cette densité. Si vous l’avez trouvé, n’hésitez pas à le mettre en commentaire.
BreF
Je ne suis pas sure qu’on soit beaucoup plus avancés sur le cas des masques barrière faits maison. Ce matin sur France Inter, Olivier Véran a bien précisé que “le masque fabriqué chez soi n’offre pas toutes les garanties” et a invité à “moins utiliser les fabrications artisanales”. Le problème est posé. Est ce qu’un jour nous devrons obligatoirement utiliser des masques chirugicaux ou des masques en tissus industriels qui répondent aux normes ? Nous ne le savons pas pour l’instant. Nous verrons ce qui sera décidé dans les jours qui suivent.
MISE A JOUR DU 22/01/2021 : Olivier Véran demande aux Français “de ne plus utiliser de masque artisanal” Lire l’article de France Info.
Je me permets de rappeler que l’utilisation d’un masque, tout performant soit-il, ne dispense pas des gestes barrières et de la distanciation sociale. Big up à ceux qui vont faire les courses avec un masque FFP2 et qui se curent le nez à la caisse. Si, je vous jure.
Gourdement,
Anne
Avant de commenter :
- Je ne vends pas de masques.
- Toutes les infos sur la fabrication de masques à la maison sont dans l’article du tuto initial mis à jour depuis la version 1.1
- Je vous encourage aussi à consulter la FAQ éditée par l’AFNOR qui est régulièrement mise à jour.